Conférence

Les principes physiques dans les projets architecturaux de Léonard de Vinci

Le concept général d’harmonie, bien que lyrique et romantique, trouve sa base en quantités et mesures précises, c’est-à-dire en quantités fondées sur des lois arithmétiques et géométriques. Trouver les « nombres » et les « codes » qui gouvernent la génération de proportions fondamentales pour produire de l’harmonie était une préoccupation constante du génie de Léonard de Vinci dont les finalités étaient de déterminer l’équilibre des éléments avec l’ensemble ; d’identifier l’ordre, les symétries et les similitudes dans la multiplicité fascinante et dans la complexité des manifestations de la Nature ; d’élaborer des théories pour expliquer le comportement des systèmes et de définir les limites de la prévisibilité. À cet égard, dans le monde des artistes et des scientifiques du XVème et du XVIème siècle, il faut attribuer à Léonard un très élevé degré d’originalité pour le caractère unique de ses idées, dont les motivations ne sont pas encore clarifiées, qui fait de lui un précurseur de nombreuses disciplines.

Léonard, qui définissait lui-même « discepolo della sperienza » (« disciple de l’expérience »), a utilisé l’expérience pour voler à la Nature son intime « ratio ».

Pour Léonard « mesurer » la Nature avait la signification :

a) d’étudier les « Arithmoi », les nombres ;

b) d’observer sa tendance à produire des dispositions symétriques et des ratios de proportion parmi les parties ;

c) d’organiser les manifestations du monde par des schémas numériques ;

d) d’identifier dans ces schémas numériques des symétries, des invariances, des correspondances et des similitudes.

Pour Léonard « dove non è quantità non è divisione » (« là où il n’y a pas de quantité il n’y a pas de division ») : le monde de la quantité n’est pas seulement un monde « visible », mais aussi un monde « divisible » et donc « mesurable ». Dans ce cadre l’Homme de Vitruve de Léonard n’est que l’exemple paradigmatique de l’étude quantitative qu’il a utilisée pour communiquer, par le langage immédiat de l’image, l’essentialité d’effectuer des mesures et l’importance de comparer des quantités physiques, un système de proportions basé sur l’observation des relations parmi les différentes parties : si le carré représente la réalité physique, cette image devient l’image opérationnelle du processus de mesure qui utilise des instruments et des facteurs de conversion pour atteindre la connaissance, symbolisée par le cercle, à laquelle l’homme aspire sans jamais pouvoir y accéder pleinement.

Léonard s’inspirait toujours de la Nature par une approche systémique et interdisciplinaire qui impliquait l’étude des corrélations parmi la structure, la dynamique et la fonction; une approche originale qui l’a conduit d’abord à l’interprétation des principes physiques de base des phénomènes étudiés, puis à l’adaptation et à la conception de structures et instruments. Il faut noter à cet égard que, si l’architecture tend à transformer quelque chose qui est purement fonctionnel dans quelque chose qui est un mélange de fonctions et d’esthétique, Léonard était un architecte puisque dans sa production la fonction était toujours reliée à la forme esthétique et accompagnée par l’extraordinaireté des dessins.

L’architecture a donc représenté pour Léonard la « summa » de ses résultats innovants et anticipatifs dans les domaines de la statique, de la dynamique, de la dynamique des fluides, de l’acoustique et de l’optique, qui étaient fonctionnels à sa vision organique ; Léonard était également inspiré par les codes de la Nature et des sciences et les utilisait, comme dans le cas du nombre d’or, dans la conception architecturale des volumes et des structures, par une approche qui, du point de vue de la fonctionnalité, offrait des avantages en termes de connectivité et de résistance, et, du point de vue de l’esthétique et de la représentativité, transmettait l’idée de harmonie structurelle, de la simplicité et de l’équilibre.