Communauté

Fête de la Science

Les bactéries, nos alliées pour vieillir beau ?

Publié par ARD CVL Cosmétosciences, le 15 octobre 2018   1.5k

>> Image de Une : La vieillesse n'est plus ce qu'elle était… Shutterstock

Emmanuelle Percheron, Université d’Orléans

Cet article est publié dans le cadre de la Fête de la Science 2018 dont The Conversation France est partenaire. Retrouvez tous les débats et les événements de votre région sur le site Fetedelascience.fr

Ce texte a été co-écrit avec le Dr Isabelle Krolikiewicz-Renimel.


Il y a 30 ans seulement, on s’extasiait devant la photo de famille avec une grand-mère au centre, ridée, cheveux gris, tenant sur ses genoux ses petits-enfants. Aujourd’hui, cette même scène ne fait rêver que s’il s’agit de l’arrière-grand-mère !

À 50 ans, nos grands-mères étaient de vieilles femmes. De nos jours, la femme de 60 ans incarne la beauté mature, voire une certaine forme de jeunesse, comme en témoignent les unes de médias où figurent des actrices ou mannequins affichant une soixantaine resplendissante. Le vieillard d’hier n’est plus celui d’aujourd’hui.

« Vieillir beau », une nouvelle préoccupation

Selon une étude récente de l’Insee, en 2050 en France, un habitant sur trois aura plus de 60 ans, contre 1 sur 5 aujourd’hui. Une petite fille sur trois née en 2003 sera centenaire. Notre espérance de vie augmente donc, et notre volonté de « vieillir beau » aussi.

L’emprise du temps sur notre horloge biologique est toujours la même, mais grâce aux progrès de la médecine, les grands fléaux ont disparu de nos latitudes. De plus, notre mode de vie a changé : l’exposition déraisonnée au soleil des années 1970 tend à disparaître, nous surveillons notre alimentation (« 5 fruits et légumes par jour »), nous faisons plus d’activité physique et redevenons moins sédentaire.

Tous ces changements de comportement sont étroitement liés aux avancées scientifiques qui ont permis d’acquérir une meilleure connaissance de l’impact de l’environnement sur nos fonctions vitales, sur nos organes et notre peau.


À lire aussi : Comment savoir si vous êtes sédentaire ?


Évaluer les effets de l’environnement sur la santé grâce à l’exposome

Le vieillissement, qui commence avant même la naissance, n’est pas uniquement le fait de notre horloge biologique. Il résulte aussi de l’interaction de multiples facteurs dont il est difficile d’apprécier l’influence isolée. Cet ensemble de facteurs est communément appelé l’exposome.

Le terme exposome est apparu officiellement en 2015 dans le cadre de la loi Touraine. Pour la première fois, une approche multifactorielle des effets de notre environnement sur notre santé est envisagée. L’exposome regroupe en effet tous les types d’exposition que notre organisme subit tout au long de son existence : les rayonnements ultraviolets (UVs), la pollution, les variations extrêmes de températures (exposition prolongée aux infrarouges par exemple), les perturbateurs endocriniens… L’association de ces différents facteurs contribue à précipiter le vieillissement.

La pollution, accélérateur de vieillissement

Véritable problème de santé publique, la pollution est un catalyseur de troubles pour notre organisme. Connue pour ses méfaits sur la santé humaine (maladies respiratoires, cardio-vasculaires), ses méfaits sur la peau étaient jusqu’à récemment occultés.

En sa qualité d’enveloppe corporelle, la peau subit directement les affronts du temps et de l’environnement. Le vieillissement cutané fait partie du processus général du vieillissement de l’organisme. De par son caractère visible, il en constitue souvent un marqueur précoce. Notre beauté extérieure, notre âge apparent sont les reflets de notre âge physiologique.

Les agressions liées à la pollution ont un point commun : elles augmentent le stress oxydant dans nos cellules, avec pour conséquence un statut micro-inflammatoire, quasiment silencieux, responsable de l’altération de nos cellules, de nos organes, de notre peau.

Le microbiote cutané à la rescousse

L’Homme est un écosystème à part entière. En effet, il cohabite avec environ 100 milliards de bactéries, dont 10 millions vivent sur ses mains. Ce microbiote joue un rôle fondamental dans notre santé. Il participe à l’homéostasie du corps humain, cet équilibre qui le protège contre une invasion massive d’importuns peu recommandables : les micro-organismes pathogènes.

Contrairement au microbiote intestinal, le microbiote cutané a été jusqu’à récemment ignoré, voir considéré comme indésirable (chez nombre de personnes, le lavage des mains tourne parfois au trouble obsessionnel compulsif !). Des études récentes ont pourtant montré combien son équilibre était primordial pour la qualité de la peau et son intégrité.

En raison de la pollution et de l’emploi de produits de soins de corporels plus ou moins agressifs, on observe une augmentation drastique des problèmes cutanés tels que des hypersensibilités ou des dermatites atopiques se traduisant par l’apparition de rougeurs, de démangeaisons. Si on analyse alors le microbiote, on constate que celui-ci est perturbé. Dans ces zones abimées, certaines espèces de « bonnes » bactéries commensales disparaissent au profit d’espèces potentiellement pathogènes. Qui plus est, des bactéries généralement présentes dans les zones hydratées migrent vers d’autres endroits, amplifiant ainsi les sensations d’inconfort des peaux fragilisées.

Il est possible dans certains cas de « réconcilier » notre peau avec son environnement en ayant recours à des produits cosmétiques capables de préserver le microbiote tout en protégeant la peau contre les agressions extérieures : produits solaires protégeant des UVA et B, crèmes anti-âge luttant contre les radicaux libres…

L’être humain est donc un écosystème vivant dans une écosphère potentiellement hostile. La légendaire fontaine de Jouvence pourrait demain prendre la forme d’une union harmonieuse entre l’Homme, son environnement et son microbiote. Une chose est sûre : désormais, vieillir beau n’est plus tout à fait une utopie.The Conversation

Emmanuelle Percheron, Manager Administratif et Scientifique Cosmétosciences, Université d’Orléans

La version originale de cet article a été publiée sur The Conversation.